Adoptions de Blaise

L’automne. Voilà bien l’une de mes saisons préférées. Non pas pour la pluie ou même pour les températures qui refroidissent. Non, plutôt pour ses couleurs chaudes et vibrantes. Des jaunes, des ocres, des oranges, même des rouges et des marrons. Une palette de couleur mélancolique. Une transition à la foi triste mais réconfortante. Imaginez si l’automne était terne ou même en noir et blanc, là ce serait le summum de la déprime. Or il n’était rien. La pluie de feuille également qui tapissait le sol d’une couche tout aussi colorée rendaient ce spectacle éphémère tout aussi mémorable. Je me baissais pour ramasser une feuille tandis que je parcourais le parc. Une feuille de chêne avec son aspect jaunissant, tirant vers le marron et son contour ondulé comme des vagues. Elle ressemblerait presque à un nuage si elle était toute blanche. Mais je pensais alors, une feuille morte dans ma main, était-ce vraiment le drame de la nature au bout de mes doigts ? Probablement pas. Un jour j’aimerais bien coller différentes feuilles de toutes les couleurs de l’automne sur un support, créer une œuvre figée dans le temps pour en sublimer l'essence, et alors j'appellerai sans doute mon tableau : « Beauté mortelle ». Oui, c’était peut-être une bonne inspiration.

Puis je réfléchis alors à autre chose. Qu’est-ce que la mort ? Que cela représentait-il pour moi ? Je n’y avais jamais été confronté, je n’ai jamais perdu d’être cher. Je suis encore jeune et je vis de façon insouciante, me rapprochant sans cesse du moment fatidique sans jamais y penser vraiment. Est-ce que c’était douloureux ? Mais surtout y avait-il quelque chose après ? A part des souvenirs… comment faisait quelqu’un pour gérer la perte d’un être cher ? Ce devait être déchirant. Je ne sais pas ce que c’est, comment pourrais-je compatir ? J’imagine juste que ce pourrait être un moment douloureux à passer.

Je levais la feuille au dessus de moi, juste devant le soleil. Les rayons passaient un peu à travers, dévoilant les nervures ocres du végétal. Plus aucune vie ne s’écoulant. La fin de quelque chose, le renouveau d’une autre. C’était comme un cycle. Je laissais tomber la feuille et celle-ci flotta délicatement jusqu’à retourner au sol, ce même endroit qui l’avait fait naître. Elle n’était que poussière et elle redeviendra poussière. Finalement je lâchais un soupir. Pourquoi je pensais à ça ? Par moment il m’arrivait vraiment d’être un peu trop sentimental.

Je reportais de nouveau mon attention sur le bâtiment en face de moi. J’avais décidé de réserver un pokémon. Il s’agissait d’un spectre, quelle ironie d’ailleurs. Je m’étais présenté à l’accueil et on m’avait dit d’attendre un moment. J’ai attendu un petit moment donc, et l’une des hôtesses et revenue avec la sombreball que j’avais décidé d’utiliser pour l’occasion. Oui, encore une manie de ma part d’allier l’apparence de l’objet avec le style du pokémon. L’hôtesse s’était excusée parce qu’elle avait mis du temps à retrouver le pokémon. Je n’avais pas compris sur le coup comment on pouvait perdre de trace un pokémon. On m’avait aussi conseillé de faire attention à l’espièglerie du spécimen. C’était un feuforêve femelle et je m’attendais un peu à avoir des surprises avec un spectre. Avant que je parte avec la ball, on m’avait demandé si je lui donnerais un petit nom. J’avais déjà ma petite idée, et lorsque je le dévoila, on m’avoua que c’était mignon. Hmm… mignon je ne sais pas, j’aimais bien c’est tout.

Je sortis alors la sombre ball et libéra mon pokémon.

« Allez montre toi, Miss Terria. »

La ball s’ouvrit, il y eut le phénomène tout à fait habituel qui l’accompagnait, mais… aucun pokémon n’était sorti. Je ne comprenais pas, j’étais juste là avec mon air incrédule, les sourcils froncés. J’ai regardé à l’intérieur de la ball comme si j’espérais voir quelque chose alors que c’était totalement inutile, mais bien sûr rien du tout. J’étais même assez naïf pour secouer à côté de mon oreille l’objet sphérique pour me rendre compte si quelque chose clochait. Puis un frisson glacial me parcourut le long du dos. Je me retournais aussitôt, l’air alerte et tendu.

« Miss… Terria ? » demandais-je inquiet.

Je regardais au loin, tournant la tête dans tous les recoins pour observer si la présence spectrale ne s’y trouvait pas. Je me concentra un peu plus sur ma vision, relâchant mon angoisse et ce fut sans doute mon erreur.

« FOOO ! »

En l’espace d’une seconde j’avais vu une silhouette translucide foncer vers moi puis apparaître totalement devant mes yeux, à quelques centimètres de mon visage, je voyais ses yeux aussi gros et proche que possible. J’avais sursauté, perdu l’équilibre et j’étais tombé à la renverse, atterrissant de tout mon long sur un tas de feuilles mortes après avoir poussé avec effroi un cri aigu. Juste après j’entendis un ricanement raisonnant et faisant écho comme s’il venait d’outre-tombe. Je rouvris les yeux et vit Miss Terria en train de glousser, tandis que j’essayais de me relever, encore un peu sous le choc.

« Ah… tu trouves ça marrant hein ? Hmm bon, on m’avait prévenu après tout. »

Je me remis d’aplomb et m’essuyait grossièrement le dos pour enlever les quelques feuilles humides qui s’étaient collées à moi. A présent la feuforêve ne riait plus, mais elle s’était mise à fredonner tout en flottant autour de moi, m’observant avec curiosité. Je ne pouvais que me laisser faire après tout. Quand elle eut finit ce petit manège elle revint en face de moi, flottant en l’air tout en dessinant des huit.

« Du coup, ça te va comme nom, Miss Terria ? »

La spectre interrompit son balais aérien pour à présent paraître pensive, elle inclina la tête d’un côté, puis de l’autre, effectua une rotation sur elle-même dans la sens des aiguilles d’une montre et retrouva une position neutre en lâchant un petit sourire.

« Feufooôôô ?… Feuforêve ! »

Ensuite elle gesticula de façon joyeuse en zigzagant à de nombreuse reprises comme pour former un "W". Voilà encore un autre pokémon remplit de surprise, je n’étais pas au bout de mes peines, c’était certain. Mais bon vous me direz que je ne m’ennuie pas comme ça au moins.

Je réfléchis ensuite un moment au pokémon en face de moi, ainsi qu’à mes pensées de toute à l’heure. En voyant ce spectre à l’air joyeux, au final je me dis qu’il n’y avait aucune raison d’être triste, la vie continuait malgré tout.

Vous savez ce qui est plus simple que de s’embêter à combattre un pokémon pour espérer l’obtenir ? C’est de faire quelques pas vers le centre d’adoption, les mains dans les poches et d’aller faire son choix au centre d’adoption en toute tranquillité. C’était sans doute ma flemme qui m'incitait à opter pour ce genre d’opportunité. Autant vous dire que je risque de venir souvent adopter dans le but d’agrandir mon équipe. Je dois bien avouer que les combats n’étaient pas trop ma tasse de thé, et surtout aller dans un endroit particulier de l’île pour trouver tel pokémon me semblait tout à fait épuisant. Surtout que je n’aimais pas chercher.

Pourtant sans le savoir il m’arriver de tomber sur une surprise, sans vraiment m’y attendre. Ma rencontre avec Seles était pour ainsi dire une sacré aubaine. Ce genre d’occasion ne se représenterait certainement plus. Mais clairement j’avais l’impression de sous-utiliser le potentiel du séléroc. J’avais l’impression qu’on m’avait donné un PC haut de gamme alors que je ne jouais qu’à des jeux rétro en 2D. C’était un peu overkill. Il me faudrait sans doute un peu de temps avant que je n’exploite le plein potentiel de ma lune flottante. C’est pourquoi je préférais plutôt accueillir des spécimens déjà plus dans mes cordes.

Mais surtout je voulais que mes compagnons grandissent en ayant cette vision artistique de leurs aptitudes et non pas en ayant connu uniquement la barbarie à l'état sauvage. Notez que je parle de barbarie, comme j’aurais pu parler de sauvagerie et que je n’ai pas fais état de robustesse. La robustesse est une démonstration de ses talents principalement physiques. On parle d’art martial. Un shaofouine qui respecte les codes de son art est capable d’émerveiller des gens en effectuant des gestes précis même dans le vide, tout comme on est impressionné lorsqu’un machopeur veut démontrer combien de briques il est capable de casser d’un seul coup. Ce que je veux dire par là, c’est que n’importe qui est capable de donner des coups, ou même de gribouiller. Pourtant sans maîtrise du geste on est incapable de produire quelque chose d’artistiquement riche. Mais bon… ce n’était que mon avis. Prenez-le comme vous voulez.

Donc je m’étais dirigé vers le comptoir et j’y avais fais ma demande. Mes critères étaient les suivant : Je voulais quelque chose de rose, de féérique, et de mignon. Et bizarrement… hé bien le centre avait ce qu’il fallait pour moi ! Non pas sous forme de pokémon prêt à l’emploi (bon ça fait bizarre dis comme ça) mais plutôt sous forme d’œuf. J’avoue n’avoir jamais eu l’occasion de m’occuper d’un œuf avant. Mais l’important c’était de ne pas être maladroit, n’est-ce pas ? Et attentionné aussi, ça peut aider. Bon… mais alors surprise. On m’affirma qu’il était impossible que je n’en prenne qu’un seul.

« Pourquoi ?
- Hé bien tu vois, les parents ont eu deux œufs. C’est une mélodelfe et un grodoudou et ils sont très attachés l’un à l’autre. Je pense qu’ils préféreraient que leur petit soit également ensemble. Si ça ne te dérange pas.
- Euh… hmm… non non. Je crois… je crois que ça devrait aller oui, pas de soucis.
- Très bien ! Tu verras, s’occuper d’une fratrie c’est toujours remplie de bonnes surprises. Je me suis déjà occupé d’un posipi et d’un negapi qui étaient frère une fois, ils étaient adorable ensemble.
- Ouai ça doit être bien, j’imagine.
- Bon ! Je vais chercher le premier œuf dans ce cas ! Ne bouge surtout pas d’ici. »

Je hochais la tête en silence et laissa l’hôte de la pension s’éloigner. Puis l’air songeur je m’imaginais ce que cela pourrait donner. Si c’était deux melo femelle qui écloraient, ou bien une configuration encore différente. Tout pouvait arriver au final, j’avais hâte d’avoir la surprise en tout cas. Dans tous les cas il est certain que je devais prendre soin d’eux. Lors d’un cours sur les évolutions j’avais appris que ces deux espèces différentes évoluaient toutes les deux si elles étaient heureuses, puis elles avaient besoin d’une pierre lune. Voilà bien un procédé qui me facilitait la tâche. Je n’étais pas spécialement friand de combat pokémon à tout prix pour les faire progresser, même si j’étais conscient que je devais passer par là. Je mis faim à ma réflexion lorsque la dame revint avec un œuf rose et le posa sur le comptoir.

« En voilà un. Et je vais récupérer l’autre ! »

Je hochais la tête de nouveau, légèrement impatient. Pourvu qu’elle ne mette pas trop de temps à revenir...

Aujourd’hui il neige.

Il neige comme je ne l’avais plus vu depuis un moment. Cela me rendait presque nostalgique, mais je ne sais pas vraiment pourquoi. Il neige, mais aujourd’hui je vais également aller récupérer un autre pokémon au centre d’adoption. J’ai su qu’ils avaient un otaquin et j’en voulais un depuis un moment, alors bien sûr j’ai sauté sur l’occasion. La neige crisse sous mes pas, mais pourquoi j’ai l’impression que cela m’évoque un bon souvenir ? Je n’arrive pas à mettre la main dessus. Plus tard j’arrive enfin à voir le bâtiment au-delà de cette brume blanche. Je m’y introduis rapidement pour me réchauffer. Il n’y a rien de bien stimulant à dire d'autre à part que j’ai reçu le pokémon dans la scuba ball que j’avais confié. A noter cependant qu’on m’avait avoué que j’avais de la chance car il s’agissait d’une femelle otaquin et qu’il en naissait bien moins que des mâles. Alors voilà, je m’estimais chanceux tout simplement.

Je remerciais l’hôte et fit sortir mon pokémon. C’était une créature assez enjouée, car après m’avoir scrutée de la tête au pied d’un air curieux elle me lança un sourire, puis me tapotait la jambe avec une de ses pattes. Mais elle insistait en regardant la main qui portait la ball. Elle voulait jouer avec ? Je la lançais donc et l’otarie réceptionna l’objet au vol sur son nez, tandis qu’elle s’efforçait de la tenir en équilibre. On aurait presque dis un numéro de cirque ! Je m’étais mis à sourire, puis pensais aussitôt : « le cirque ». Je fronçais les sourcils comme si le sentiment de nostalgie souhaitait refaire surface mais sans succès. Alors je décidais de plonger mon regard au travers de la fenêtre pour réfléchir. Il neige tellement dehors. Un cirque ? Un cirque et de la neige oui, je me rappelle à présent.

Winscor en pleine fête du Cadoizo.

Je crois bien que j’ai six ans, je ne sais plus exactement. Je suis assis avec Papa et Maman de chaque côté dans les gradins d’un chapiteau de cirque. On était allé à la fête foraine ce jour là et il neigeait pas mal, je m’en souviens très bien maintenant. Je pense même me rappeler de deux numéros. Le premier c’était le dressage de Némelios. Un mâle entouré de deux femelles étaient perchés sur des structures, rugissant et crachant des flammes. J’avais été impressionné par le grand jet de flamme qu’avait craché le mâle à un moment, je me souviens d’ailleurs avoir sursauté et j’avais même senti la chaleur venir jusqu’à moi, mes yeux ébahit sans doute et le bruit des applaudissements qui suivirent juste après. La seconde démonstration qui m’avait marquée, c’était également celui avec les galopa de Galar qui trottinent tout autour de la scène avec un acrobate qui se tenait dessus. C’était une vision tellement féérique. Une fois de plus j’avais des étoiles dans les yeux, le sourire jusqu’aux oreilles, je me souviens même avoir dis à ma mère :

« Maman ! Est-ce que j’peux avoir un galopa aussi ? S’il te plaiiiit !
- Hé bien un jour peut-être, quand tu seras plus grand mon cœur, mais pas maintenant. » Avait-elle répondu de la façon la plus maternelle qui soit. Ce qui m’avait valu de soupirer et de légèrement bouder sur le coup.

Avec du recul je me dis toujours que cette requête n’était pas tombée dans l’oreille d’une sourde et je peux m’estimer heureux d’avoir eu des parents à mon écoute.

Je me souviens aussi de quelques détails du reste de la journée. Il faut dire que la fête foraine dans notre arrondissement de Winscor proposait tout de même de nombreuses activités. Mais à cet âge si jeune je ne pouvais pas faire grand-chose encore. Surtout que mes parents ne me quittaient pas d’une semelle. Voici donc d’autres choses dont je puisse me souvenir : Ce M.Mime de Galar qui me faisait un peu peur mais qui proposait gratuitement des ballons gonflés à l’hélium aux enfants. Je me souviens que je m’étais caché dans les jambes de ma mère parce que j’étais trop intimidé par le pokémon. Puis elle m’a demandé quelle couleur je voulais. Je me souviens que j’ai failli dire « bleu » plutôt que « rose » car des garçons de ma classe s’étaient moqués de moi quand j’ai dis que ma couleur préférée était le rose, qu'ils disaient que c'était un truc de fillette. Donc j’ai dis « rose » parce qu’après tout j’étais avec mes parents et ce n’était pas comme d’être avec les autres enfants débile de ma classe. Et donc le M. Mime m’avait tendu un ballon rose avec un sourire et je l’avais remercié d’une façon un peu timide, jusqu’à ce que je souris à mon tour.

Ensuite mes parents m’ont aussi acheté une peluche mélofée que j’ai toujours gardée depuis. Et il y avait également cette barbe à papa qui me faisait envie ailleurs. Du reste je me souviens aussi avoir fais un tour de manège. Je choisis toujours d’aller sur le ponyta de Galar en bois. Je le chevauche, je fais un tour de manège et je m’amuse comme un fou, faisant coucou à mes parents à chaque tour. C’était l’âge de l’insouciance à vrai dire. Un sentiment que j’ai l’impression d’avoir perdu, que j’essaye de traquer, qui revient de lui-même sans crier gare parfois, mais qui s’envole de nouveau avant que je n’ai pu en capturer l’essence véritable, même en essayant de coucher l'impression sur un support, sur l'instant, le temps d'un dessin. Mais tout ceci me semble trop volatile.

Revenant dans l’instant présent, j’observe alors l’otaquin s’amuser comme une folle avec la scuba ball, la tenant à l’équilibre et la faisant sautiller. C’est bien ce que m’inspire un tel pokémon, l’insouciance de la jeunesse, l’amusement sans aucune responsabilité qui trotte dans la tête en arrière plan, sans toutes ces hormones qui travaillent intensément à me faire penser à des choses différentes. Je m’accroupis alors en souriant, elle me renvoie la ball avec un coup de museau, je la réceptionne au vol puis le pokémon saute dans mes bras. Elle est vraiment adorable.

« On va bien s’amuser ensemble hein, Cerulia ?
- Ow ow ow ! »

Me voici avec une étoile montante de plus dans mon équipe. Mon imagination s’affole et je me dis alors : Une otaquin, une otarlette et même une oratoria ! Tout ceci m’inspirait bien trop pour que je ne puisse rater mes futures démonstrations. Le meilleur restait à venir sans doute ?

La fin de l’hiver est imminente, mais il fait toujours aussi sombre et froid à cette heure-ci. Il est 18h passé lorsque je quitte la salle d’étude après avoir fais tous mes devoirs. Il fait déjà nuit. Malgré tout je me dirigeais vers le centre d’adoption, tandis que les réverbères du parc éclairaient mes pas. Une brise froide et mordante m’accable. J’ai vraiment hâte que le printemps revienne. Je suis particulièrement frileux tout comme Rainbow et des fois je rêve de pouvoir être en permanence à l’abri comme elle dans une petite sphère où je serais au chaud et qu’on me foute la paix un moment, en parfait introverti que je suis.

Quand j’arrive au centre on me livre bien rapidement la sombreball qui contient ce nouveau pokémon sur lequel j’ai jeté mon dévolu. Encore une adoption oui, je crois que je suis devenu accro à cette façon de me faire de nouveaux compagnons. Je fais sortir le pokémon et c’est un funécire qui m’apparait, flottant en face de moi. Il n’a pas l’air triste ni content de me voir, il m’observe juste pendant un moment puis il observe les alentours, s’attarde sur une petite plante en pot, puis se concentre sur la personne qui venait de me confier ce pokémon. J’essaye tout de même de l’interpeller, lui faire comprendre qu’il est avec moi mais aussi pour briser un peu la glace, chose particulièrement appropriée en cette saison.

« Hé ! Par ici Twinkle, on va rentrer d’accord ? »

Il se tourne et me dévisage de nouveau, penche sur le côté l’air intrigué puis s’avance vers moi et attend. Au moins il m’écoute, c’est déjà un bon point. Je vais pour remercier l’hôte mais quelque chose m’en empêche aussitôt. Toutes les lumières s’éteignent, c’est le black-out complet. Je regarde à l’extérieur et m’aperçoit que les luminaires du parc n’éclairaient plus rien. J’entends l’hôte pester un moment, chercher quelque chose dans sa poche pour en sortir son smartphone afin de s’éclairer puis m’adressa la parole.

« Je vais vérifier ça, à moins que tu ne veuilles déjà partir.
- Oui je pense que je vais rentrer, répondis-je simplement.
- Très bien, tu as à ce qu’il faut pour t’éclairer ? »

Pour ainsi dire c’était évident à l’heure actuelle, d’ailleurs c’était assez amusant. Avec un léger sourire je désignais le funécire qui éclairait déjà d’une lueur tamisée la pièce à lui tout seul. Toutefois j’entrepris de fouiller dans ma poche pour sortir mon propre téléphone et en activer la lampe.

« Haha ! Oui je ne me fais pas de soucis alors. Dans ce cas bonne soirée à vous deux. J’espère que ça va pas durer longtemps cette histoire...
- Ouai… en tout cas merci encore à vous. Au revoir ! »

Je m’éclipsais, quittant le centre baigné d’une ambiance profondément sombre. Il faut dire que j’appréciais la lueur que dégageait Twinkle, en plus de la douce chaleur. Les ombres dansait au rythme de sa flamme. Je crois que je vais souvent le laisser sortir dans ma chambre quand j’ai envie de lire un livre. J’ai toujours adoré la lecture à la bougie, mais ma mère ne voulait pas que j’en allume une dans ma chambre, de peur que cela enclenche l’alarme à incendie, et puis il y avait aussi d’autres problèmes liée à la fumée qui s’en libérait, pas forcément sain sur le long terme ais-je appris.

Nous étions à présent dehors et j’éclairais un peu plus loin devant avec la lampe de mon portable tandis que la lueur du funécire nous offrait une visibilité aux alentours assez convenable. Pourtant je vis la lumière m’accompagnant s’écarter, allant à l’opposé de là où se trouvait l’entrée de l’académie. Twinkle s’écartait comme s’il venait de voir quelque chose, je l’appelais alors aussitôt.

« Hé Twinkle… attends-moi Twinkle ! Tu vas où bon sang ?! »

Le funécire s’arrêta et revint vers moi, de nouveau comme la dernière fois, calme et neutre. Il m’avait écouté et me suivait de nouveau. Voilà encore un pokémon dont je devais apprivoiser le caractère. C’était quoi cette fois-ci ? Trouble de l’attention ? Curiosité excessive ? En tout cas il réitira de nouveau son manège, et cette fois-ci je grognais. Je ne comptais pas me laisser tourner en bourrique très longtemps. S’il faisait ça de nouveau je risquais bien de le faire revenir dans sa ball. Je n’avais clairement pas envie de m’éterniser dans la parc en pleine nuit alors qu’il fait froid. Du reste je ne m’inquiétais pas tant, j’aimais bien ce genre d’atmosphère. On pouvait voir quelques étoiles, un quartier de lune décroissant et on entendait même un Hoothoot hululer de temps en temps.

Je rejoignis la bougie spectrale qui semblait flotter vers l’inconnu, tandis que mon pouls s’accélérait à fournir ainsi l’effort de le rattraper. Je l’ai déjà dis, je n’avais rien d’un athlète. Mais au moins ça réchauffait un peu, voyons le bon côté des choses. Twinkle s’arrêta finalement à proximité d’un buisson où je le retrouvais un peu hors d’haleine. Je m’aperçus alors avec un léger effroi qu’il observait un fermite en train de mordre une feuille entre ses mandibules. Passé la surprise je me détendis de nouveau. Visiblement la lumière du funécire gêna l’insecte car il accouru bien vite avec ses petites pattes pour se réfugier quelque part. Twinkle le suivit aussitôt, je grognais de nouveau et nous fûmes arrivés jusqu’à un petit terrier ou le fermite s’engouffra avec dextérité. Le spectre se rapprocha de l’entrée et poussa quelques cris à l’intérieur comme pour appeler le fugitif.

« Fu ? Fuûuûunééééééé ? Ciiire… »

Twinkle se remit face à moi, faisant la moue. Il semblait déçus. Ok je pense que je l’ai cerné : Curieux, inattentif et joueur. On verrait sur le long terme mais je pense que je ne suis pas loin de la vérité. A peine eus-je le temps de me poser d’autres questions qu’un autre pokémon fit son apparition. Un battement d’ailes d’insecte. Je levais les bras instinctivement pour me protéger, un peu comme un froussard puis jetais un regard à travers ma protection de fortune. C’était un papinox qui tournait autour du funécire à présent. Tiens, forcément puisque d’habitude ils viennent s’intéresser aux lumières des réverbères, or ils étaient éteins à l’heure actuelle. Twinkle par contre ne semblait pas très heureux de cette petite parade papillonneuse tout autour de lui et opta pour une attaque étonnement. Aussitôt le papinox sembla sursauter et s’enfuit sans demander son reste. Le battement d’aile s’éloigna et le funécire me fit face, cette fois-ci avec un sourire puis il flotta un instant autour de moi. Je crois que j’arrivais de nouveau à avoir son attention, mais pour combien de temps ?

Je le conviais de nouveau à me suivre, mais comme je faisais le geste pour me retourner, une agitation qui semblait provenir de la forêt – oui c’était sans doute la forêt vers là bas – j’arrêtais aussitôt mon geste. Je voyais le balais aérien de deux petites lumières, une rouge et l’autre bleu, j’en déduisais aussitôt qu’il s’agissait d’un muciole et d’une lumivole en pleine parade amoureuse. C’est toujours intéressant à quel point on voit de belles choses, rien qu’en éteignant la lumière, que ce soit les étoiles, la lune ou même ces deux lucioles. Cela m’inspirait un autre type de spectacle où je pourrais employer Seles et Twinkle en même temps, comment précisément ? Je l’ignorais encore mais je trouverai bien, je faisais confiance à mon subconscient pour faire le boulot en tâche de fond.

Avant de quitter cette vision féérique, cette vision romanesque de deux pokémon amoureux, je me demandais sans vraiment y croire : Est-ce que moi aussi un jour je pourrais trouver ma moitié ? Peut-être, sans doute, je ne sais pas. En attendant j’avais déjà de nombreux projets en tête et de l’inspiration à foison. On verra bien, cela arrivera sans doute lorsque je m’y attendrai le moins.

En attendant j’avais toujours Twinkle pour mieux éclairer ma route vers l’inconnu.